6 avril 2020
Sans abri Mont de marsan (et aillleurs) : "Confinés dehors" !
Communiqué du 5 avril sur la situation des Sans abri à Mont de Marsan (Landes).
Alors qu’on nous annonce l’approche du pic de l’épidémie du corona virus dans les prochains jours, de nombreux sans abri sont toujours dans l’attente des mesures les plus élémentaires qui leur permettraient de se préserver de la contamination.
C’est le cas à Mont de Marsan où ils se sentent plus que jamais livré-es à eux même puisque depuis l’État d’urgence la fermeture de l’accueil de jour et des structures associatives rendent leurs conditions de vie encore plus difficiles. Non seulement ils sont toujours à la rue ou dans des squats plus ou moins salubres mais de plus ils ne peuvent plus bénéficier de douches quotidiennes (deux par semaine, au mieux, par l’entremise d’éducateurs).
Avec le confinement, ils sont aussi privés du soutient habituel de la population qui a déserté les rues et ils ne disposaient évidemment pas ni de gel désinfectant ni de masques (depuis peu le collectif « Mont de Marsan citoyen » leur en a fourni). Seuls les Restos du Cœur leur procurent un peu de nourriture et une poignée d’éducateurs et bénévoles un peu d’assistance, en revanche les policiers municipaux sont toujours là pour les harceler, voire les verbaliser pour leur outrecuidance à vouloir exister, dans l’espoir qu’ils migrent vers Dax où les conditions seraient meilleures !
Hier, le Candidat Emmanuel Macron, promettait qu’en un an il n’y aurait plus personne à la rue, aujourd’hui Président, il veut nous convaincre que « quoi qu’il en coûte », tout sera mis en œuvre pour circonscrire l’épidémie en protégeant au mieux la population. Nous constatons avec indignation qu’à Mont de Marsan et un peu partout en France, c’est le discours des « gens qui ne sont rien » qui prévaut dans ses choix et son incapacité à protéger les plus vulnérables d’entre nous, bien qu’il dispose pour cela de la Loi de réquisition.
Alors qu’ils ont plus que jamais le sentiment d’être les laissés pour compte de ce gouvernement, reprochera-t-on aux Sans-abri de vouloir sauver leur peau en s’émancipant, aux professionnels de faire leur boulot et à quelques citoyens de leur porter assistance ? Réunis dans le Kollectif Pour une Initiative Responsable d’Action et de Transition Éphémère et Sociale (PIRATES), les Sans-abri Montois demandent de l’aide, de l’hygiène et un minimum de considération, et lancent un appel. Aujourd’hui c’est au gouvernement de traverser la rue pour aller à leur rencontre.
Les Sans abri Montois se sont regroupé en collectif, une initiative qui leur permets de mieux se faire entendre. Non sans humour ils ont choisi pour nom : Kollectif Pirates = "Pour une initiative responsable d’action et de transition éphémère et sociale" et ouvert un compte Facebook dans lequel ils formulent leurs demandes et où vous pourrez aussi leur témoigner votre soutien en cliquant sur le lien ci-dessus ou leur logo :
Une situation, que l’on retrouve un peu partout sur le territoire :
En temps normal ce n’est déjà pas simple et pas toujours rose, mais avec le coronavirus tout devient encore plus compliqué comme le démontre le "Kollectif Pirates", l’oxymore "enfermés dehors" prend tout son sens avec l’État d’urgence véhiculant cette impression de danger permanent avec ce péril invisible. Par ailleurs, l’information n’a pas beaucoup circulé, ce que décrit le témoignage de David dans l’interview vidéo de "Brut média" du 18 mars : "comment les SDF vivent le confinement".
Ce que confirment aussi de nombreux articles dans la presse :
- Article de Ouest France du 16 mars : "Coronavirus Vannes, les sans abri dans l’inconnu".
- Article du journal "La Croix" du 18 mars : "Coronavirus les Sans abri, grands oubliés du confinement".
- Article du Figaro du 24 mars : "SDF, le confinement ne doit pas être synonyme d’isolement".
La question des Sans-abri verbalisés pour non respect du confinement :
Le sujet a soulevé beaucoup d’émotion et a déjà fait couler beaucoup d’encre, c’est encore le cas à Mont de Marsan. Il y a eu beaucoup de témoignages, du côté des Préfectures, c’était Non ! puis, peut-être... et enfin : Oui mais... vous comprenez, certains ont mal parlé aux policiers (et pour cause !), ou ils ont abusé de leur mobilité (sic.). Mais tout le monde sait qu’il y a les "gentils SDF" (comprenez dociles et bien soumis) et des "mauvais SDF" (les aigris, les insoumis, des Gaulois réfractaires, quand ils ne sont pas en plus alcoolisés !), cela fait un bail qu’on nous vante -surtout dans les communes dites "de gauche"- les mérites des polices municipales "de prévention", un terme généralement réservé pour le travail social... Arrêtons de prendre les gens pour des imbéciles ! Depuis le début de la crise le gouvernement ne cesse de se contredire et d’assener des contre-vérités, des affirmations suivies de rétro-pédalages, que ce soit sur la fermeture des écoles, le confinement, le port des masques, la prescription de l’hydroxychloroquine, etc. Sans vouloir généraliser, s’il y a bien un sujet "sensible" dans la rue c’est la relation des Sans abri et des polices municipales, la liste des abus et/ou violences policières serait longue et fastidieuse... Pour ce qui me concerne, en tant que rédacteur de cet article, je ne résiste pas à exhumer cette vieille histoire datant de 2007.
- Article Huffington Post 25 mars : "Sdf verbalisés, coronavirus- confinement ".
- Libération Checknews du 24 mars : "est ce que des Sdf ont été verbalisés en France...".
Et ailleurs dans le Sud Ouest ?
Et ailleurs, il y a aussi des villes où les choses se passent bien, du moins mieux (sous toutes réserves) : à Dax le Centre d’accueil de nuit de l’agglomération dacquoise est complet, la fermeture de l’hébergement d’Urgence du dispositif hivernal géré par la Croix Rouge sur une commune limitrophe a été reportée (il est aussi complet), il reste encore des gens à la rue ou en squat mais l’accueil de jour est aussi prolongé en mode hivernal (ouvert toute la semaine) et il il a des maraudes le soir. Un accueil spécifique, dit de "desserrement" a été ouvert pour les plus démunis atteints par le virus au Centre Jean Paul II, géré lui aussi par des professionnels.
Dans le Pays Basque nord, comme à Dax, la situation est laissée aux mains des travailleurs sociaux et des mesures ont été prises pour augmenter les capacités d’hébergement.
A Bordeaux, la problématique est plus complexe en raison du plus grand nombre de sans abri et de la présence de squat de migrants réfugiés et demandeurs d’asile avec nombre de familles comme le souligne le média "Rue 89". Un lieu spécifique pour les Sans abri avec chien a été ouvert dans un hangar du très branché "espace Darwin".
De quoi inspirer le nouveau maire de Mont de Marsan...
- Article "Médiabask" du 23 mars : "Bayonne et Biarritz mettent les sdf à l’abri".
- Article "Rue 89 Bordeaux" du 18 mars : "Coronavirus, quel sort pour les sans abri ?".
- Interview France Bleue du 30 mars : "des sdf et leur chiens accueillis sur le site de Darwin".
Le Conseil d’État saisi par les Association a tranché...
A l’instar des associations de soignants qui réclamaient notamment la réquisition de stocks de masques et d’usines de fabrication ainsi que l’autorisation d’utiliser de la chloroquine, neuf associations ont saisi en urgence le Conseil d’État face aux carences concernant la protection des personnes les plus précaires à la rue ou mal logées.
Le Conseil d’État a rejeté, jeudi 2 avril, la saisine de la Fédération nationale droit au logement, la Ligue des droits de l’Homme, l’association Élu/es contre les violences faites aux femmes, Utopia 56, Droits d’Urgence, le Gisti, l’Action chrétienne contre la torture et l’association KÂLÎ. Saisine qui a pu être faite grâce au précieux soutien du réseau inter-associatif national qui œuvre quotidiennement sur le terrain afin que soient ordonnées en urgence les mesures indispensables à la protection des personnes les plus vulnérables.
Cette requête visait notamment la réquisition des appartements en location meublée touristique et chambres d’hôtels vacants ainsi que la protection des personnels encadrant via l’accès à des masques, du gel hydroalcoolique, des gants et des blouses. Toutefois, le Conseil d’État relève que le gouvernement :
– A donné des instructions le 31 mars (après l’audience) pour que ne soient plus dressées d’amendes aux sans-abris.
– Déclare que l’hébergement en gymnase "a vocation à ne conserver qu’un rôle résiduel grâce à l’augmentation en cours des capacités d’hébergement dans des hôtels ou dans des centres touristiques, voire par le recours à des réquisitions si cela s’avère nécessaire".
Les associations attendent maintenant que le gouvernement passe à l’acte et permette aux personnes qui en ont besoin d’accéder à un logement individuel sans passer par l’ouverture de gymnases mais par la réquisition des très nombreux logements vides qui, selon nous, reste la seule solution digne et juste.
— Signer la pétition : COVID19 : SOS Sans logis, mal logés et locataires !